Lu pour vous: "Les invités"  de Pierre Assouline
[Collection Folio n°5085,  ISBN : 9782070420667, 208 pages 5,60  € pour 132g soit un prix de 42,42 € au kilog]



Pierre Assouline est un grand lecteur; son blog, célèbre et célébré, en témoigne. Il est aussi un observateur de son temps: il suffit là de citer les biographies, entretiens et documentaires que nous lui devons. Le livre puise à ces deux passions.

Les dîners dans la grande bourgeoisie parisienne sont sans doute les rejetons des salons d'antan. Avec force citations -Gustave Moreau, les préraphaélites, Quevedo, Pascal, ...- un arrière-plan culturel est dressé. On espère que les mots d'esprits fuseront dans cette réunion de notables. Et Guitry est au rendez-vous.

Mais que Pierre Assouline s'intéresse aussi aux mots tout simplement ne nous surprendra pas non plus. De nombreuses distinctions sont établies. Pour en citer quelques-unes: fragile/frêle, manquer/rater, taciturne/discret, ... Il collectionne aussi les expressions peu courantes comme "se royaumer" [se prélasser], hypermnésie, mutique... avec parfois ce souci de trouver une tournure nouvelle à de vieux termes; autant aller en boîte avec mémé. Cela peut relever du gargarisme: commensaux, commensaux, commensaux...
Si ce mot est si beau, pourquoi ne pas en avoir fait le titre du livre?

Sans doute parce que le titre revêt un sens double.

Les invités, ce sont d'abord toutes les personnes conviées à cette soirée. L'auteur prend plaisir à brosser quelques portraits, puisque presque un tiers du roman y est consacré. Ce qui nous laisse le temps d'appréhender les nombreux conflits susceptibles d'éclater.

Les invités, ce sont aussi les étrangers dans un pays, à qui on le fait parfois bien sentir, quand ils n'ont pas d'eux-même cette prudence ou cette réserve de ceux qui ne font que passer. Suite à un incident, ils se retrouveront au centre de la discussion. "Madamede", la maîtresse de maison, se voit contrainte d'accepter sa bonne à table, en tant que quatorzième invitée. Étudiante brillante d'origine maghrébine, elle va briser malgré elle l'équilibre délicat tant recherché dans ces réceptions.

Les masques vont tomber, les mondanités et les courbettes seront oubliées.  Plus de mouches au bout des fleurets. Comme nous n'assistons pas pour autant à un banquet platonicien, où la recherche de la vérité serait posée comme idéal, mais à un dîner en ville, où chacun vient pour être en société, la cuisine n'étant même pas essentielle, nous découvrirons non pas la raison, mais les raisons de chacun.

Les convives auront, somme toute, passé une soirée intéressante. Nous aussi.
Ils ne l'oublieront pas de sitôt. Espérons que nous non plus.
"Dom Juan" et son convive de pierre est un classique, maintenant vous pouvez lire "Les invités" de Pierre!


Pour en savoir plus:
* Entretien
* Wikipédia

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